Notre premier palmarès des villes françaises les plus engagées pour l’égalité femmes-hommes publié à l'occasion du colloque "le sexe de la ville" le 7 mars, en dit plus par ses silences que par ses réponses. Rennes se distingue.
La plupart des grandes villes françaises ont signé la charte Européenne de l’égalité femmes – hommes. Et pourtant, nombre de questions sur les engagements pris dans ce texte sont restées sans réponse. Notre questionnaire, fortement inspiré de cette charte, a été adressé aux 50 plus grandes villes de France hors Paris - car la Capitale, qui est aussi un département, dispose de moyens différents.
Notre Edito :
LE SEXE DE LA VILLE, QUESTION POLITIQUE
Notre magazine papier
Les premières à nous répondre sont aussi les villes qui figurent parmi les plus en avance sur le sujet. Les autres ne disposent pas de données sur les inégalités sexuées ou ne les communiquent pas. Difficile dans ces conditions de les combattre. Ce qui n’est pas compté ne compte pas. Ne pas compter le nombre d’hommes et de femmes, de filles et de garçons licenciés dans des clubs sportifs bénéficiant de subventions de la ville par exemple permet d’ignorer des injustices et la perpétuation de stéréotypes.
Des intentions plus que des actes
Ce palmarès est donc une première édition que nous voulons renouveler chaque année pour mesurer les progrès. Si la moisson d’informations n’est pas très riche cette fois-ci, elle est en tout cas instructive et révélatrice d’un faible intérêt des plus hautes instances pour le sujet. Cependant, plusieurs villes nous ont communiqué des plans d’action très complets qui doivent être mis en place cette année et comprennent tout ce que la charte préconise. Restera à voir, dans notre édition 2016, si les actes auront suivi.
Sur 50 villes sollicitées, 13 seulement nous ont répondu malgré nos relances. Et nous remercions celles qui ont joué le jeu. Des pionnières sans doute. Rennes est la ville numéro 1 de notre palmarès (Lire ci-dessous l'interview de la Maire de Rennes, Nathalie Appéré). Parce qu’elle a pu répondre à presque toutes les questions, parce qu’elle est la seule ville parmi les 50 plus grandes de France à avoir le label égalité. Suit un groupe de villes prenant des initiatives positives. Mais ces initiatives sont très diverses et ne permettent pas d’entrevoir un mouvement de fond.
Nos questions portaient d’abord sur l’équipe municipale et le personnel municipal. Grâce à la loi sur la parité en politique les équipes sont mixtes mais les portefeuilles souvent stéréotypés : aux hommes les finances et la voirie, aux femmes la petite enfance et le handicap. Cependant les villes dans lesquelles ces attributions sont fortement stéréotypées ne sont pas forcément les pires par ailleurs. Toulouse ou Villeurbanne ont par exemple des équipes très stéréotypées mais se rattrapent ensuite en ayant une forte proportion d’élues femmes au sein de la communauté de communes dont elles font partie. 43 % pour Toulouse et 47 % pour Villeurbanne. De son côté, Saint Etienne a une équipe municipale peu stéréotypée mais côté élus dans la communauté de communes, la ville compte un peu moins de 4 % de femmes. Ce qui ne fait pas, néanmoins, de cette ville le cancre de l’égalité puisqu’elle se rattrape sur d’autres points par ailleurs.
Budgets favorables aux hommes
Une deuxième série de questions portait sur les budgets alloués spécifiquement aux actions en faveur des droits des femmes et de l’égalité entre femmes et hommes. Là encore, difficile de départager les communes. Ces budgets tournent autour de 0,03 % du budget total de la ville et portent sur des actions lors de la journée des droits des femmes, des aides à des associations. S’y ajoutent d’autres actions pas toujours comptées dans ce budget : financements de centres d’accueil de femmes victimes de violence, information contraception. Un gros centre de coût signalé est l’accueil de la petite enfance. Dans les villes qui nous ont répondu, le nombre d’enfants de moins de 3 ans ayant une place en crèche municipale est supérieur à la moyenne nationale qui est de 15 %. Grosse marge de progrès là aussi. Certaines villes mettent dans ce budget des formations aux stéréotypes de genre et, justement, au « gender budgeting » (budgétisation sensible au genre).
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Formations nécessaires. Car lorsqu’on aborde cette série de questions, dans beaucoup de mairies on entre en terra incognita. La question « dans le total des licencié-e-s des clubs sportifs subventionnés, quelle est la répartition femmes/hommes? » trouve 5 réponses, sur 12. Allant de 64 % d’hommes à Brest à 69 % à Rouen. Et ce n’est pas si mal… Sur les équipements sportifs publics (terrains de sport, skate parks, …) ou culturels ou encore les maisons de quartier, les villes ont très peu de données sexuées. La ville de Courbevoie se distingue par des chiffres indiquant que les femmes sont très largement majoritaires dans les bibliothèques et médiathèques (63 %) ou salles d’exposition (65 %). Mais ne dispose pas de chiffres sur les équipements sportifs publics (terrains de sport, skate parks, …) ou maisons de quartiers. Dans la plupart des villes, les bibliothèques sont majoritairement fréquentées par la gent féminine. Seule Rennes donne avec une infinie précision les chiffres de fréquentation de ses centres de loisir municipaux (F : 48,57 %, H : 51,43 %)
Sur la question des transports en commun, l’adaptation des horaires en fonction des besoins exprimés des femmes est rare car nombre de communes ne leur ont pas demandé de s’exprimer. Beaucoup de villes signalent des efforts particuliers sur l’adaptation des transports aux poussettes par exemple. Mais on est loin du compte.
Enfin l’invisibilité des femmes sur les noms de rue n’est plus tout à fait de mise. La proportion de femmes ayant donné leur nom à une rue ces cinq dernières années est partout supérieure à la proportion antérieure à ces cinq ans, même si on est très loin de la parité. Un progrès symbolique annonciateur d’un progrès tout court ?